🎆 IA : Faut-il s'attendre à un Big Bang économique ? / Débrief du Sommet de Paris
#5. Bulletin de février 2025
👋🏻 Bonjour à tous,
Je suis très heureux de vous retrouver pour le bulletin de février en cinq parties. Nous sommes de plus en plus nombreux avec 120 nouveaux inscrits depuis la dernière newsletter, merci à tous, c’est un succès incroyable.
Ce mois-ci, j’ai souhaité approfondir les implications économiques de l’intelligence artificielle qui font l’objet de débats passionnés entre économistes. Vous allez pouvoir voter 🗳️ pour le scénario qui vous semble le plus plausible.
Conformément à vos attentes exprimées en début d’année, je propose aussi une incursion dans le monde de l’investissement dans la partie IV. Le programme détaillé de l’édition du jour est disponible juste après.
Vous pouvez cliquer sur le ❤️ juste au-dessus ou en fin de newsletter si vous appréciez le contenu. C’est très important pour remonter dans le classement des meilleures newsletters Substack. Alors n’hésitez pas !
Le programme du bulletin de février :
🔎 Ma sélection sur les impacts de l’IA sur l’économie : fort, faible, dystopique : les avis divergent sur le sujet.
✅ 6 enseignements du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle organisé au Grand Palais à Paris les 10 et 11 février.
⚙️ 10 outils d’IA pour 2025 : rédaction de courriel, prise de notes en réunion, création de vidéos, de slides, il y en aura pour tous les goûts.
📊 L’évolution du portefeuille fictif Google Finance : je propose un premier bilan du portefeuille lancé le 1er janvier et c’est très mouvementé !
🎁 La rubrique bonus sur les autres news croustillantes du mois : les agents IA arrivent, la guerre ouverte entre Sam Altman et Elon Musk, le Cryptogate en Argentine, etc.
IA : vers un Big Bang économique ?
S’il y a un sujet qui fait débat entre les économistes, c’est bien l’impact que pourrait avoir l’IA sur l’économie dans le futur 🔮. Il faut le dire, les avis divergent fortement sur la question. Pour certains, les conséquences seront massives. Pour d’autres, elles pourraient être nettement plus limitées. Qu’en est-il vraiment ?
En l’état actuel, il est impossible de répondre de manière définitive à la question tant les incertitudes sont nombreuses. Il est néanmoins possible de présenter trois scénarios :
Le scénario optimiste : à moyen / long terme, l’IA va générer des gains de productivité importants qui stimuleront la croissance économique. Même s’il faut s’attendre à des bouleversements dans le monde du travail, les nouveaux emplois créés par l’IA devraient compenser les emplois supprimés. À plus long terme, le rythme d’innovation pourrait s’accélérer de manière significative et réduire de manière drastique le temps nécessaire aux découvertes scientifiques 👨🏻⚕️. Des organisations hybrides, mêlant humains et machines, pourraient se généraliser.
🧚♂️ Les gains de productivité, une notion économique fondamentale, désignent l'augmentation de l'efficacité avec laquelle une entreprise, un secteur ou une économie utilise ses ressources (travail, capital, matières premières) pour produire des biens et des services.
En d'autres mots : c'est produire plus avec la même quantité de ressources ou produire la même quantité avec moins de ressources.
Les gains de productivité permettent de baisser ⬇️ les coûts de production, augmenter les profits des entreprises, et (en théorie) les salaires et améliorer le niveau de vie sur le long terme. Le scénario pessimiste : l’IA pourrait se révéler décevante. Elle aurait un impact plus faible que prévu sur les gains de productivité et donc sur la croissance économique et les niveaux de vie. En gros, l’économie de demain ne serait pas tellement différente de celle d’aujourd’hui. Ceux qui défendent une telle position s’appuient sur le paradoxe de Solow qui stipule que 📣 “les ordinateurs sont partout, sauf dans les statistiques de productivité”. Pour résumer, l’idée est la suivante : l’adoption d’une nouvelle technologie ne se traduit pas immédiatement par des gains de productivité. Elle nécessite du temps avant de produire ses effets.
Le scénario dystopique : l’IA serait bien très puissante dans ses applications, mais dystopique dans ses impacts. Les richesses importantes créées pourraient être captées par une “oligarchie technologique”. Dans ce monde, les inégalités augmenteraient entre ceux qui maitrisent et possèdent la technologie et le reste de la société. De très nombreux emplois disparaitraient sans être remplacés par d’autres. Des entreprises florissantes sans salariés, des licornes 🦄 qui n’emploieraient aucun humain, pourraient arriver !
🟢 En ce qui me concerne, j’ai voté pour le scénario optimiste …
J’ai écarté d’emblée le scénario pessimiste. De mon point de vue, l’IA n’est pas qu’une simple innovation, c’est une révolution de l’intelligence 🧠. Par conséquent, elle ne peut nullement être comparée à un simple approfondissement de l’économie numérique. Pour la toute première fois, une technologie est en mesure de faire aussi bien voire mieux que nous dans un grand nombre de secteurs.
Très vite, l’IA devrait produire une hausse ⬆️ des revenus pour les entreprises qui sauront l’intégrer opportunément dans leurs activités. C’est déjà le cas de Meta grâce à un ciblage publicitaire optimisé.
Je dois dire que j’ai ensuite hésité entre le scénario 1 et le scénario 3. En supposant que l’IA génère une hausse significative de la croissance économique, il faudra voir qui en profite. Il y a un risque bien réel de concentration des richesses aux mains d’une oligarchie technologique.
Pour autant, je pense que le scénario dystopique peut être évité. D’une part, l’IA devrait créer de nouveaux produits et emplois (même si elle en détruit en parallèle) ainsi que de nouvelles industries et de nouvelles entreprises, comme cela a été le cas lors des 25 dernières années, de l’iPhone à Gmail 📩. J’ai fait un post à ce sujet sur la page LinkedIn de Lettres Ouvertes. D’autre part, je pense qu’une gouvernance responsable se mettra peu à peu en place pour atténuer les risques posés par l’IA. Enfin, il me semble que nous avons tout à gagner de synergies hommes - machines.
Je m’arrête ici mais évidemment je ne fais que lancer le débat. De nombreuses questions se posent : dans quelles proportions l’IA va remplacer le travail humain ? À quelle échéance ? Quels seront les secteurs les plus touchés ? N’hésitez pas à aller faire un tour sur le forum Reddit de Lettres Ouvertes pour partager vos réflexions.
> Pour en savoir plus :
L’étude de McKinsey : “The economic potential of generative AI : the next productivity frontier”
Le papier de recherche de Daron Acemoglu “The Simple Macroeconomic of AI”
Les perspectives d’investissement de BlackRock : “AI’s big questions”
L’article de la Boston Review : “AI’s Future Doesn’t Have to Be Dystopian”
6 enseignements du Sommet pour l’action sur l’IA
Le sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle organisé au Grand Palais à Paris s’est tenu les 10 et 11 février ! Que faut-il en retenir ?
1️⃣ Le sommet ressemblait plus à un "festival de l'IA" avec des événements organisés en parallèle de la réunion à proprement dite, comme le "Business Day" à la Station F qui a connu une très forte affluence ;
2️⃣ Le mot "Action" a remplacé le mot "Safety". Contrairement aux deux premiers sommets de Bletchley Park 🇬🇧 et de Séoul 🇰🇷, le sommet de Paris a fait la part belle aux opportunités de l'IA plutôt qu'à ses risques ;
3️⃣ Mistral AI, une startup française fondée en avril 2023, a été LA star du Sommet et son cofondateur Arthur Mensch a été très en vue. L’entreprise a lancé Le Chat le 6 février, le ChatGPT européen 🇪🇺, qui a enregistré un million de téléchargements depuis.
4️⃣ Des investissements privés massifs, à la fois français et internationaux, ont été annoncés en France 🇫🇷 pour un montant total de 109 milliards 💶. De son côté, l’UE a lancé l’initiative « InvestAI » pour mobiliser 200 milliards ;
5️⃣ Le choix de faire passer au second plan les risques qui entourent l'IA n'a pas été du goût de tout le monde, notamment de Dario Amodei, le cofondateur d'Anthropic ;
6️⃣ Les Américains 🇺🇸 semblent faire cavaliers seuls sur l'IA. Ils s'opposent à une régulation stricte et s'inquiètent, par la voix de JD Vance, de partenariats avec des entreprises de pays autoritaires ; la Chine 🇨🇳 sans la nommer.
Pendant le Sommet, réussi selon moi, j’ai proposé un sondage sur le compte Threads de Lettres Ouvertes. La question était la suivante : la France peut-elle devenir l’un des leaders mondiaux de l’IA ? Sur 171 votants, 63% ont répondu “Non”.
10 outils d’IA pour 2025
Pour mes abonnés, j’ai dressé une liste de 10 outils ⚙️ d’IA à tester en 2025 :
synthesia.ai : générateur de vidéos
lindy.ai : rédiger des e-mails
Freepik.com : éditer du contenu audiovisuel
remini.ai : éditer des images
wordtune.com : résumer de notes
pictory.ai : éditer des vidéos
starry.ai : générer des avatars
soundraw.io : générer de la musique
otter.ai : générer des résumés de réunion
slidesai.io : générer des slides
Évolution portefeuille fictif de Lettres Ouvertes
Pour les nouveaux abonnés, je précise que j’ai créé le 1er janvier 2025 un portefeuille 💼 Google Finance de 18 valeurs de différents secteurs (détails dans ce lien). Il s’agit d’un outil pratique pour suivre les dynamiques sur les marchés financiers et surtout pas d’un conseil pour investir. Au niveau macro, deux grands événements ont eu lieu sur la période qui ont fortement affecté le portefeuille :
Le premier événement marquant a été le cygne noir ⚫️ suscité par DeepSeek, un modèle d’IA chinois (prétendument) moins cher mais tout aussi performant que les meilleurs modèles américains. Son lancement a causé la stupeur dans le monde, remettant en question les lourds investissements de la big tech ; l’IA étant jusqu’alors supposée très coûteuse à développer. Les répercussions sur les marchés ont été impressionnantes. Au cours d’une seule séance, le 27 janvier, Nvidia a baissé d’environ 17 %, effaçant 590 milliards de capitalisation boursière 😵💫. Vistra et Constellation Energy, des fournisseurs d’énergie pour les data centers faisant partie du portefeuille virtuel, ont également fortement baissé. Depuis, les cours sont repartis à la hausse… DeepSeek aurait coûté jusqu’à 1,6 milliard de dollars selon une étude très sérieuse de Semi Analysis. C’est 266x plus cher qu’annoncé.
🧚♂️ Un cygne noir est un événement rare, imprévisible, qui a un impact majeur et qui, après coup, est rationalisé comme s'il avait pu être anticipé. Ce concept a été popularisé par Nassim Nicholas Taleb.
Exemples : la crise financière de 2008, les attentats du 11 septembre 2001, la pandémie de COVID-19, l'effondrement de LTCM en 1998, etc.Deuxième événement marquant : le retour au pouvoir de Donald Trump a interrompu ⛔️ la tendance haussière observée sur les marchés, américains en premier lieu. Son comportement erratique sur les taxes douanières qu’il entend appliquer (en particulier sur les alliés historiques des États-Unis) n’est pas du goût des investisseurs, de plus en plus inquiets des répercussions économiques (hausse de l’inflation américaine, stagflation) et géopolitiques de sa politique commerciale protectionniste. Du reste, le climat des affaires se dégrade déjà dans le pays.
📊 Quel est le bilan ? Le portefeuille, composé en majorité d’entreprises américaines, est en hausse de 5% depuis le 1er janvier, soit un gain de 350 euros. C’est mieux que le Nasdaq (+1,10 %, en orange) et le S&P 500 (+2,24 %, en turquoise), mais moins bien que le CAC 40 (+ 10,29 %, en jaune) et l’Euro Stoxx 50 (+ 11,33 %, en violet).
Au total, 14 entreprises enregistrent une hausse 📈 et 4 entreprises une baisse 📉. La meilleure performance est réalisée par Constellation Energy en hausse de 27,15 % et la moins bonne par Tesla en baisse de 16,35 % (cf. bonus de février).
Le bonus de février
Après Operator en janvier, OpenAI - qui a passé la barre des 400 millions d’utilisateurs hebdomadaires - a lancé Deep Research en février. Il s’agit de deux agents d’IA : le premier est à usage général pour réaliser des tâches à notre place sur un ordinateur comme réserver un billet d’avion ✈️ ou faire des courses 🛒, le second permet d’effectuer des recherches approfondies dans des domaines variés tels que la finance, la politique et les sciences. Une fois la requête envoyée, l’outil met quelques minutes ⏳ pour générer un rapport complet long de plusieurs milliers de mots. Perplexity a également lancé une offre similaire en février. De son côté, Mira Murati a lancé sa startup « Thinking Machines », 6 mois après son départ d’OpenAI où elle était directrice de la technologie ;
Pendant le Sommet de Paris sur l’IA, Elon Musk a fait une offre hostile 🔥 de 97,4 milliards de dollars pour racheter la structure à but non lucratif d’OpenAI qui contrôle aujourd’hui l’entité à but lucratif. Son patron Sam Altman, présent au Sommet, a répondu que sa startup n’était pas à vendre et que la manoeuvre était destinée à les “ralentir”. En effet, OpenAI cherche actuellement à faire évoluer sa gouvernance. La suite au prochain épisode !
Meta évolue de sommet en sommet. L’entreprise a enchainé les séances de hausse en Bourse (20 à la suite jusqu’au 14/02). C’est le seul 🏆 membre des géants de la tech à connaître un excellent début d’année 2025. Sa stratégie dans l’IA open source est couronnée de succès avec un retour sur investissement déjà visible. Dans le même temps, Meta est en train de créer une équipe robotique au sein de sa division Reality Labs selon des informations de Bloomberg ;
Alphabet (la maison mère de Google) et Microsoft ont chacune effacé 200 milliards de capitalisation boursière à la suite de la publication de leurs résultats au dernier trimestre 2024 ! Les investisseurs s’inquiètent du ralentissement de la croissance de leurs services cloud et de leurs investissements massifs dans l’IA qui pourraient ne pas porter leurs fruits. De son côté, Tesla 🚘 a enregistré en janvier 2025 sur un an une baisse vertigineuse de ses ventes en Europe, notamment en France (-63 %) et en Allemagne (-59,5 %). Il faudra voir dans les mois qui viennent si le phénomène est conjoncturel ou structurel … les acheteurs attendant peut-être la sortie du nouveau Model Y de la marque ;
Javier Milei, le président argentin 🇦🇷, est au cœur d’un scandale lié à son soutien à la crypto $LIBRA. Après en avoir fait la promotion sur X permettant au memecoin d’atteindre 4,5 milliards de dollars de capitalisation, l’intéressé a supprimé son message quelques heures plus tard, ce qui a entrainé sa chute et des pertes massives pour des milliers d’investisseurs. L’opposition en Argentine, qui y voit une manipulation de marché, a appelé à sa destitution. Milei a reconnu une erreur, mais s’est défendu de toute connivence avec les créateurs du projet qui auraient utilisé la technique “du rug pull” (tirer le tapis), une arnaque où les développeurs d’une crypto fuient avec les fonds qu’ils viennent de lever.
Autre scandale qui éclabousse le secteur crypto : la plateforme d’échange Bybit a été victime le 21 février de la plus grande fraude de l’histoire des cryptos, avec un vol estimé à 1,5 milliard de dollars en Ethereum. Un groupe de hackers nord-coréens nommé Lazarus serait à l’origine de l’attaque. Malgré l’ampleur du vol, Bybit assure être encore solvable et que les retraits restent possibles.
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À très vite,
Amaury
Très intéressant comme d’habitude, merci !