♾️ Édition n°100 : Le capitalisme de surveillance va-t-il continuer à prospérer ?
Décryptage
Bonjour à tous,
Je suis très heureux de vous retrouver pour la centième édition 💯 de Lettres Ouvertes, ma newsletter sur les nouvelles tendances, l’innovation technologique et le futur. Oui, déjà ! Je ne pensais pas avoir autant écrit 📇 ces 30 derniers mois.
Pour l’occasion, j’ai décidé de publier un décryptage 🔭 consacré au capitalisme de surveillance, un système économique qui utilise la technologie pour capter et vendre les données personnelles et comportementales des individus, de nous tous.
Ce format vise à prendre du recul avec l’actualité pour mieux se concentrer sur les tendances lourdes ou megatrends qui modifient l’économie et façonneront, d’une manière ou d’une autre, notre futur.
Surtout, n’hésitez pas à partager Lettres Ouvertes à vos amis pour élargir le réseau :
Note : la première version de ce post a été originellement publiée sur LinkedIn mais j’ai décidé de la partager ici, avec l’ajout de quelques éléments supplémentaires pour prolonger les discussions. Prévoyez 15 minutes de lecture ⏳
Pour cette édition : je me suis basé sur l’excellent livre 📚 de Shoshana Zuboff, une sociologue américaine et prof à Harvard, intitulé L’Âge du capitalisme de surveillance.
Le livre se décompose en 3 parties :
la genèse du capitalisme de surveillance,
son extension rapide et,
ses effets sur l’individu et la société.
La surveillance numérique à l'échelle industrielle
Nous sommes de plus en plus nombreux à en avoir conscience : les géants technologiques nous observent 👀 et s'approprient nos données pour en tirer un avantage et, surtout, des revenus considérables.
En gros : ils collectent et utilisent toutes les informations que nous partageons sur les réseaux sociaux, moteurs de recherche et autres applications numériques qu’ils revendent aux annonceurs, en général de grandes entreprises, pour générer des publicités ciblées. Il y a aussi les fameux cookies, les fichiers informatiques pas les gâteaux 🍪, qui permettent de collecter des données sur l’internaute.
Il existe donc un vaste marché des données personnelles qui permet aux grandes plateformes du numérique de s'enrichir à deux niveaux :
en vendant les informations (centres d'intérêts, comportements en ligne, localisation, âge, etc.) qu'elles collectent sur nous aux entreprises clientes et ;
en fournissant un espace pour la diffusion des publicités ciblées.
L'exploitation de nos vies privées va même bien plus loin : elle vise à prédire nos comportements futurs 🔮 et à les modifier, pour nous proposer tout un tas de produits et services, des articles, des vidéos et des expériences individualisés.
Même si nous sommes de plus en plus informés sur ces pratiques, les coulisses, l'ampleur et les effets de ce vaste système complexe restent mystérieux pour beaucoup.
💬 Mme Zuboff écrit d'ailleurs dans le premier chapitre :
"Le capitalisme de surveillance sait tout de nous, alors que ses opérations sont conçues pour que nous n'en sachions rien".
Pour l'auteur, les bases du capitalisme de surveillance ont été jetées le 9 août 2011, date à laquelle Apple 🍏 est devenue l'entreprise la plus fortement capitalisée du monde, devant Exxon Mobil.
Mais qu'est-ce qui a vraiment changé ?
Alors que le capitalisme industriel reposait sur l'exploitation et le contrôle de la nature, le capitalisme de surveillance repose sur l'exploitation et le contrôle de la nature humaine !
La conséquence la plus visible est que le cœur de la consommation s'est déplacé de la masse à l'individu. Le capitalisme de surveillance cible sa proie 🦅 pour lui proposer un contenu spécifique en fonction de sa personnalité.
En résumé, les données (personnelles) sont devenues l’or noir de ce siècle.
Qui sont les capitalistes de surveillance ?
Sans grande surprise, les capitalistes de surveillance sont bien connus, même s'ils ne pratiquent pas tous l'expropriation de nos données avec la même ardeur. Les voici :
Google : c'est l’entreprise pionnière en matière de capitalisme de surveillance. Ses outils divers et variés que l'on connait tous sont très efficaces pour collecter des données à grande échelle : Google Chrome, Google Home, OK Google, Google Earth 🌏, Google Now, Google Assistant, Google Drive, Google Meet, Google Cloud, Google Pay, Google patati patata. Il y a aussi Android, son système d'exploitation mobile le plus utilisé au monde, Gmail, YouTube, acquis pour plus de 1 milliard de dollars en 2006 - un prix astronomique à l'époque mais un investissement qui s'est révélé très juteux pour Google en raison de l'immense trafic de recherche que génère la plateforme - . Vous voyez à quel point la "galaxie" Google est vaste.
Alphabet qui abrite 8 sociétés dont Google mais aussi Nest (domotique et objets connectés), Waymo (pour la conduite autonome) ou encore Sidewalk (technologies et urbanisation) ;
Facebook / Meta (depuis fin octobre 2021) : évidemment il y a le célèbre réseau social, mais il y a aussi Instagram 📸 (racheté pour 1 milliard de dollars), WhatsApp (racheté pour 22 milliards de dollars), Messenger, Oculus (les casques 🥽 de réalité virtuelle), mais aussi, Facebook Watch et Facebook Live (pour diffuser des vidéos). Là encore, on est dans la crème de la crème en matière de surveillance online.
Amazon n'est pas qu'une entreprise de vente à distance, elle collecte aussi nos données grâce à Amazon Prime, Alexa ou Echo (son enceinte connectée). Elle connaît nos goûts et nos préférences presque mieux que nous ;
Microsoft : un peu moins intrusive que les 3 précédentes puisque son activité principale consiste à vendre du matériel informatique, mais l’entreprise est quand même bien présente dans le capitalisme de surveillance. C'est encore plus le cas depuis le rachat par Microsoft de LinkedIn pour une somme énorme de plus de 26 milliards de dollars 💸 qui lui a permis d'avoir accès à un torrent de données personnelles, mais surtout au “graphe social1” (cf. l’infographie) qui permet d’identifier les relations sociales 🕸️ entre les individus. Il est possible de rajouter Cortana, l’assistant personnel intelligent de l’entreprise.

Apple : un peu comme Microsoft puisqu'il s'agit d'une entreprise qui génère des produits, qui a une vraie identité de marque, avec des produits "design" et qui entend faire un peu mieux en matière de respect de la vie privée numérique avec son système d'exploitation iOS. Toutefois, n'oublions pas son assistant vocal Siri (un peu dépassé maintenant), la fameuse Apple Watch ⌚️, la montre connectée ou Apple Pay (précision : nos données bancaires ne seraient pas conservées dans les serveurs de la marque à la pomme, contrairement à Google Pay).
Il faut ajouter que le capitalisme de surveillance ne se limite pas aux énormes entreprises de la tech que tout le monde connait. Il y a d'autres applications bien connues telles Tinder 💞, excellente pour connaître votre pedigree dans les moindres détails.
Mais il y aussi de plus petites boîtes sur le créneau comme Palantir du fameux Peter Thiel, le serial entrepreneur de la Silicon Valley, et d'autres que nous ne connaissons même pas : HiQ, Safegraph, Spireon, etc.
L'extension du capitalisme de surveillance
Au tout début limité à la publicité en ligne, le capitalisme de surveillance s'est peu à peu propagé au monde physique avec des objets palpables connectés 🛜 qui ont fait entrer Internet dans une nouvelle dimension. C'est ce qu'on appelle l'Internet des objets (IoT - Internet of Things).
Pour décrire le phénomène, nous parlons même désormais d'informatique ubiquitaire, ou de pervasive computing. En clair, Internet est partout sans même que l'on s'en aperçoive. 🔖 Le concept est résumé de la manière suivante par Mark Weiser, un célèbre chercheur en informatique :
"Les technologies les plus profondes sont celles qui disparaissent. Elles s'intègrent dans la texture de la vie quotidienne au point qu'on arrive plus à les en distinguer".
Pour illustrer le propos qui précède, L'IoT, un marché à plusieurs centaines de milliards de dollars, est désormais présent un peu partout dans notre existence. Je vous propose quelques exemples juste après :
…
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