âš Bonjour Ă tous,
đšâđ» Tout dâabord, nous sommes trĂšs heureux de vous retrouver aprĂšs un petit break, avec 52 abonnĂ©s supplĂ©mentaires.
đ Cet Ă©tĂ©, nous avons dĂ©cidĂ© de dĂ©velopper un nouveau format en lieu et place du weekly rĂ©cap : le monthly rĂ©cap ou, pour parler en đ«đ· français, le rĂ©capitulatif mensuel. LâidĂ©e nâest pas dâen faire moins, mais de faire mieux !
âïž Nous vous proposons aujourdâhui de dĂ©couvrir la premiĂšre Ă©dition du monthly.
đ Elle contient deux Ă©volutions par rapport au Weekly :
1ïžâŁ Lâajout dâune nouvelle rubrique intitulĂ©e âla pĂ©pite Ă©conomique du moisâ, une trouvaille dâun chercheur ou dâun Ă©conomiste qui donne un Ă©clairage de grande qualitĂ© sur les dĂ©bats contemporains.
2ïžâŁ Un nombre plus limitĂ© de rubriques (pas plus de 6). Ce nâest pas par fainĂ©antise đ€Ł, on vous le jure, mais pour aller Ă lâessentiel.
đŻ Dans les prochaines semaines, nous dĂ©terminerons quel format est le plus adaptĂ© entre le weekly rĂ©cap qui privilĂ©gie lâactualitĂ© immĂ©diate (au risque de subir âlâinfobĂ©sitĂ©â) et le monthly rĂ©cap, qui nĂ©cessite davantage de prise de recul sur les sujets traitĂ©s pour les replacer dans une logique de long terme.
L'infobésité (ou "surinformation" ou "information overload" en anglais), c'est quoi concrÚtement ?
C'est un concept rĂ©cent (amplifiĂ© avec l'arrivĂ©e d'Internet) qui dĂ©signe l'excĂšs d'information qu'une personne ne peut traiter ou supporter sans nuire Ă elle-mĂȘme ou Ă son activitĂ©.
La surinformation peut ĂȘtre dangereuse : elle entraĂźne un risque d'ordre psychosocial chez l'individu (stress, dĂ©pression, perte de repĂšre, colĂšre, anxiĂ©tĂ©, mal-ĂȘtre). En gros : le sujet dĂ©lire !
đ De lĂ , une question se pose : faut-il privilĂ©gier la prise de distance ou se rĂ©soudre Ă subir lâemprise du quotidien, de lâimmĂ©diatetĂ© et des Ă©crans qui tournent en boucle ? (âđ» vous avez 4 heures).
Pour tout dire, notre cĆur đ balance. Vivre en marge du quotidien nâest pas simple et comporte le risque de ne plus ĂȘtre suffisamment âconnectĂ©â Ă la rĂ©alitĂ© sociale. Mais sâen Ă©loigner apaise. Pour trancher, les neuroscientifiques sont les meilleurs conseillers. Pour eux, nous nâutilisons pas assez notre cortex prĂ©frontal, oĂč est localisĂ© (en gros) lâintelligence et les Ă©motions. Lâenjeu consisterait donc Ă dĂ©velopper cette partie du cerveau đ§ afin de renforcer nos capacitĂ©s intellectuelles et la maĂźtrise de soi.
ConcrĂštement : publier moins souvent, mais mieux, avec plus de questionnements de long terme, regroupĂ©s dans une perspective historique, semble donc ĂȘtre une voie intĂ©ressante Ă explorer pour contrer les effets dĂ©lĂ©tĂšres de lâexcĂšs dâinformations.
Une telle dĂ©marche permettrait de sĂ©parer le bon grain de lâivraie, tout en permettant de mieux conceptualiser.
đ Concernant le timing de publication : le monthly rĂ©cap serait (si nous retenons cette formule) publiĂ© le dernier dimanche de chaque mois vers midi avant lâapĂ©ro, comme aujourdâhui.
đ€·ââïž Pourquoi le dimanche, nous diriez-vous ?
Eh bien ⊠parce que câest le jour du repos dominical, ce repos instaurĂ© par lâempereur Constantin en 321 (oui, ça ne date pas dâhier) et quâil est, on y croit, propice au vagabondage intellectuel, ⊠enfin nous lâespĂ©rons car lĂ nous rentrons en concurrence avec Netflix.
Pour conclure notre petite digression, nous avons dĂ©cidĂ© de vous faire travailler un peu đ : le devoir maison consiste Ă nous Ă©crire un message pour nous dire quelle est la formule que vous prĂ©fĂ©rez. Cela nous permettra de ne pas dĂ©cider seuls.
PS : Si vous aimez ni lâune ni lâautre, vous pouvez nous le dire aussi, mais on ne sera plus copains, snif.
đČđ© Pour vous abonner, câest ici, en cliquant sur le bouton bleu plus bas :
Allez, cette fois, câest parti !
đ LA SĂLECTION DU MOIS
đȘđș Pour la premiĂšre fois en presque 20 ans, la BCE a dĂ©cidĂ© de rĂ©viser sa cible dâinflation. RĂ©viser peut paraitre un bien grand mot quand on regarde lâannonce Ă la loupe mais dans lâunivers feutrĂ© des banquiers centraux, câest dĂ©jĂ une petite rĂ©volution.
Explications : la BCE a dĂ©cidĂ© dâaccepter une pĂ©riode temporaire dâinflation lĂ©gĂšrement au-dessus de lâobjectif de 2%. Or, depuis 2003, la cible devait ĂȘtre âproche, mais infĂ©rieure Ă 2% Ă moyen termeâ. En gros, la cible Ă©tait une ligne rouge Ă ne surtout pas franchir.
DorĂ©navant, la BCE parle dâinflation symĂ©trique et câest Ă ce niveau que se trouve toute la subtilitĂ©. MĂȘme si un niveau dâinflation supĂ©rieur Ă 2% est dĂ©sormais tolĂ©rĂ© (sur une pĂ©riode de temps encore floue), il faut tout de mĂȘme Ă©viter des Ă©carts Ă la hausse comme Ă la baisse trop importants.
Pourquoi ce changement ? Cela indique que la BCE pourrait ne pas adopter de mesures trop restrictives (comme une hausse des taux) si lâinflation venait Ă dĂ©passer modĂ©rĂ©ment la cible de 2%. Les agents Ă©conomiques ont donc plus de visibilitĂ© Ă long terme. Câest donc un changement de dogme Ă©conomique, mĂȘme si on est encore loin dâun objectif de taux dâinflation âflexibleâ.
Contexte : La rĂ©vision dont on parle ne tombe pas du ciel, elle nâa pas Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© au bistrot sur le coin dâune table. Non, elle est bien le fruit de travaux approfondis, dans le cadre dâune revue stratĂ©gique, selon le jargon (novlangue?) BCE, dĂ©butĂ©e il y a dĂ©jĂ de longs mois.
Pour aller plus loin : Bon on se moque un peu de ces hommes et de ces femmes en costume gris đšđŒâđŒou en tailleur sombre đ§đ»âđŒ au visage hĂąve mais il est vrai que changer une cible dâinflation dans une Ă©poque si troublĂ©e est de nature Ă causer des remous auprĂšs des acteurs Ă©conomiques. Il est donc bien naturel de rĂ©flĂ©chir consciencieusement avant de se lancer dans une telle aventure.
Du reste, dans lâhistoire, nous pouvons citer deux exemples aux consĂ©quences opposĂ©es qui montrent Ă quel point les dĂ©clarations des banquiers centraux, mĂȘme si beaucoup ne les connaissent pas, (ce qui, sans rire, est assez inquiĂ©tant) deviennent parole dâĂ©vangile.
1ïžâŁ Ă la fin des annĂ©es 1980, Alan Greenspan, le patron de la Fed de lâĂ©poque, dĂ©cide une augmentation des taux mais de maniĂšre trop brutale, ce qui va contribuer Ă la rĂ©cession amĂ©ricaine de 1990. Une sacrĂ©e bourde !
2ïžâŁ Le 26 juillet 2012, Mario Draghi devient le sauveur de la zone euro. En dĂ©clarant ĂȘtre prĂȘt Ă tout pour prĂ©server lâeuro (le fameux âwhatever it takesâ ou âquoi quâil en coĂ»teâ), il rassure les marchĂ©s et Ă©viter un dĂ©sastre. Chapeau bas !
Aujourdâhui, le âquoi quâil en coĂ»teâ est appliquĂ© dans le cadre de la crise sanitaire. Avec les inondations dramatiques en Allemagne et en Belgique, il pourrait Ă©galement ĂȘtre dĂ©clinĂ© dans le cadre de la crise climatique.
đ LA PĂPITE DU MOIS
Il sâagit du graphique de lâĂ©lĂ©phant qui a Ă©tĂ© mis au point par lâĂ©conomiste serbo-amĂ©ricain Branko Milanovic, un ancien de la Banque mondiale et spĂ©cialiste des questions de pauvretĂ© et dâinĂ©galitĂ© dans la rĂ©partition des revenus.
Pourquoi le graphique porte ce nom ? Tout simplement parce que la courbe đprĂ©sentĂ©e par le graphique ressemble Ă un Ă©lĂ©phant (pas besoin dâune grande imagination pour le voir, on espĂšre donc que vous lâavez vu).
Comment est construit le graphique ? Il est le fruit dâun Ă©norme travail de recherche : la compilation des donnĂ©es đ des revenus de tous les habitants de la planĂšte du plus pauvre au plus riche sur 20 ans. On imagine le boulot, les maux de tĂȘte et les dolipranes ingurgitĂ©s pour tout mettre en cohĂ©rence !
Trois enseignements : 1) les 5% les plus pauvres de la planĂšte nâont pas rĂ©duit leur handicap relatif puisque, mĂȘme si leur revenu, sâest accru, il lâa fait moins vite que le revenu global moyen ; 2) le dĂ©clin de la classe moyenne des pays dĂ©veloppĂ©s. Leurs membres se sont relativement appauvris par rapport Ă lâensemble Ă©tudiĂ© ; 3) deux grands gagnants : la classe moyenne des pays Ă©mergents (surtout en Chine) qui ont connu des gains de revenus relatifs plus importants que les autres groupes et les super riches qui en gains absolus ont tout raflĂ© (on expliquera bientĂŽt pourquoi les super riches deviennent toujours plus riches Ă notre Ă©poque).
Implications : 1) la montĂ©e dâune Ă©lite ultra riche largement dĂ©tachĂ©e de son appartenance nationale peut constituer une menace sĂ©rieuse pour la stabilitĂ© dĂ©mocratique dans les nations dĂ©veloppĂ©es ; 2) un paradoxe : les inĂ©galitĂ©s internes se sont renforcĂ©es mais lâinĂ©galitĂ© entre pays sâest rĂ©duite.
âïž LE DESSIN DU MOIS
Celui-lĂ , on doit le dire, nous a bien fait rire. Il montre le marchĂ© (sous la peau dâun investisseur de dos), qui devant une Ćuvre dâart moderne particuliĂšrement abstraite composĂ©e dâun gribouillis de droites, explique trĂšs sĂ©rieusement : âcela me parleâ.
Il est probable que le dessinateur ait cherchĂ© Ă se moquer du comportement âirrationnelâ des marchĂ©s et des valorisations dâactifs qui peuvent aujourdâhui paraĂźtre aberrantes au regard de la fragilitĂ© de la situation Ă©conomique mondiale.
đ§đ»â𩳠LA PERSONNALITĂ DU MOIS
On vous le jure, il ne sâagit pas de notre pote Elon Musk mais dâune femme au CV bien garni. Oui câest Christine Lagarde, la directrice de la BCE, ex-ministre de lâĂ©conomie, ex-directrice du FMI, qui a su nous Ă©blouir ce mois-ci.
Pourquoi elle ? Certes elle ne brille pas toujours en conférence de presse avec des interventions jugées parfois maladroites / hasardeuses par les participants de marché, mais Mme Lagarde a au moins un mérite et pas des moindres : elle parvient à faire bouger (un peu) les lignes grùce à ses qualités de négociatrice hors-pair.
Avec elle, lâinstitution de Francfort sâouvre aussi (un peu) au monde extĂ©rieur avec un objectif nouveau dâune extrĂȘme importance que lâon dĂ©taille juste aprĂšs.
Dans les faits ⊠la BCE veut en effet prendre le leadership dans la lutte contre le rĂ©chauffement climatique đ„. Le Conseil des gouverneurs (le principal organe de dĂ©cision de la BCE qui se compose des six membres du directoire et des gouverneurs des banques centrales nationales des dix-neuf pays de la zone euro), admet que le âchangement climatique a des consĂ©quences profondes sur la stabilitĂ© des prixâ. Pour ce faire, un plan dâaction (Ă retrouver dans le lien) a Ă©tĂ© dĂ©fini avec une feuille de route jusquâen 2024.
Lâobjectif est noble, il faudra maintenant voir, de maniĂšre concrĂšte sâil gĂ©nĂšre des rĂ©sultats mesurables.
đšâđ» LE SONDAGE DU MOIS
Ce sondage đââïž a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© sur la page LinkedIn de notre newsletter. La question posĂ©e est simple : le Bitcoin peut-il survivre Ă lâarrĂȘt du minage en Chine đšđł. Pour rappel, le minage câest en gros le fait dâexploiter des serveurs informatiques (via des infrastructures volumineuses) pour valider les transactions en bitcoins.
En voici les résultats sur un petit échantillon représentatif :
MalgrĂ© ce rĂ©sultat sans appel (les trois quarts rĂ©pondent ânonâ), il faut le dire, sans ambages, le marchĂ© des cryptomonnaies (ou crypto-actifs) ne se porte pas bien. Le Bitcoin dĂ©passe tout juste les 30 000 dollars (il valait deux fois plus il y a encore quelques mois) et lâEther est redescendu sous les 2 000 dollars aprĂšs un pic Ă plus de 4 000 dollars il y a quelques semaines.
Mais : tout nâest pas perdu. Pourquoi ?
La production de bitcoin Ă©tait trop concentrĂ©e en Chine. La dĂ©cision de PĂ©kin offre une chance au Bitcoin de repartir sur de meilleures bases en utilisant des sources dâĂ©nergie plus vertes dans dâautres localitĂ©s ;
La perte de confiance dans les grandes monnaies fiat (les monnaies souveraines pour le dire autrement) pourrait sâaccĂ©lĂ©rer. De nombreux experts sâinquiĂštent en effet des injections de liquiditĂ©s massives dĂ©corrĂ©lĂ©es de la crĂ©ation de richesses (mais Ă ce stade, cela reste encore de la science-fiction et les cryptos sont encore loin dâavoir atteint ce statut de concurrent âofficielâ)
Pourquoi dit-on monnaie "fiat" d'ailleurs ?
Fiat est un mot latin signifiant "qu'il soit fait" que l'on retrouve notamment dans l'expression "fiat lux" (que la lumiÚre soit) présente au début de la GenÚse.
DerriÚre le mot, l'idée est de faire comprendre qu'il y a une autorité qui décrÚte quelque chose. Une autorité étatique dans le cadre d'une monnaie, CQFD.
đ LE LIVRE DU MOIS
Pour muscler le cortex prĂ©frontal, il nây a rien de mieux que la lecture qui permet de stimuler ses neurones par le biais dâune concentration intense. Nous vous recommandons Ă ce titre le livre de Philippe Dessertine âLe grand basculementâ, un travail exploratoire sur le monde qui sâouvre Ă la suite du COVID. Le livre traite des thĂšmes suivants :
Le changement de modĂšle Ă©conomique en cours ;
Lâurgence climatique et les consĂ©quences en matiĂšre de dĂ©cision publique ;
La crĂ©ation de dettes et les risques associĂ©s au dĂ©versement dâargent gratuit ;
Le changement de leader mondial avec une Chine qui pourrait supplanter les USA (on a quand mĂȘme du mal Ă y croire) ;
La révolution technologique qui brouille toutes les références.
De notre cĂŽtĂ©, nous retenons une phrase du livre qui rĂ©sume bien tout le problĂšme de la pĂ©riode extraordinaire que nous vivons : âQuand la personnalitĂ© la plus importante dâune Ă©conomie ou dâune zone Ă©conomique est un banquier central, chargĂ© de la crĂ©ation monĂ©taire, il est lĂ©gitime dâĂȘtre inquiet, en se souvenant de cette sorte de cas dâĂ©cole de lâEspagne du SiĂšcle dâor (la pĂ©riode de rayonnement culturel de la monarchie catholique espagnole en Europe du XVIĂš au XVIIĂš siĂšcle) oĂč lâamiral Ă©tait devenu aussi important que le roi. CrĂ©er de la monnaie nâa jamais permis de crĂ©er de la richesse.â
On vous laisse méditer là -dessus et on vous souhaite une excellente fin de week-end !
Câest tout pour ce mois de juillet pluvieux et tendu.
Nous nous retrouverons fin août pour de nouvelles aventures.
CARPE DIEM !